albums ados



TEXTES  ILLUSTRES :
GRANDS FORMATS POUR LES ADOLESCENTS
  
L'on entend souvent dire que les adolescents lisent peu ou pas.
Le Monde des Livres du 30 novembre 2012 titre :"Ados: zéro de lecture?  " . Et dans l'article l'on peut lire : "Les études récentes sont formelles : bien souvent, arrivé à l'adolescence, un jeune homme abandonne le livre. Y a-t-il un déplacement des centres d'intérêt ? Internet et autres écrans ont-ils pris la place du livre ? 14,5% des enfants de 11 ans disent "ne jamais ou presque jamais lire un livre" et ils sont, catastrophe ! 46,5%, six ans plus tard, à témoigner sans fard de leur désintérêt. ». Ce désintérêt va même jusqu'au rejet des textes illustrés que les adolescents considèrent comme des albums pour les petits.
Or, comme l'écrit Hélène Sagnet dans la revue Lecture Jeune n°119 de septembre * : "L'album est un genre d'une formidable inventivité plastique et narrative. Les artistes se sont emparés de cet espace de création et y ont réinvesti des techniques et des conceptions multiples, semblant faire fi au passage des classifications d'âge. On peut repérer dans cette production nombre d'œuvres qui, de par leur thématique, leur écriture, leurs références, ne s'adressent pas aux plus petits et sont à même de toucher un public d'adolescents."
Et dans cette même revue, Sophie Van der Linden écrit, à propos de l'album, dans l'article intitulé " Une création en prise avec son époque " : " L'album offre un rapport singulier à la lecture et la rencontre du texte et de l'image s'inscrit de façon signifiante dans la culture actuelle."
Nous voulons penser que les adolescents sauront apprécier des albums qui leur parlent d'eux-mêmes, du passé, de la beauté, ou des problèmes du monde qui les entoure et seront séduits par la qualité des textes et des illustrations.
* http://www.lecturejeunesse.com/index1024.php?page=revue_archives&menu=1&num_revue=28


Hocus pocus


Voilà un album bien surprenant. Il est composé de plusieurs contes. On y retrouve tous les ingrédients des contes : sorcière, princesses, magiciens, roi, reines, pays lointains, forêts profondes. Mais certains éléments nous font lever le sourcil, voir tousser un peu… en effet les reines de ces contes laissent leur enfant à la crèche, les rois et les reines ne s’entendent plus et se séparent, les reines refusent de donner de la soupe à leur enfant pour qu’il ne grandisse pas…. Et la dernière histoire, reprend sur le thème du petit chaperon rouge des malheurs arrivés à des grands-mères qui n’auraient jamais du ouvrir leur porte à n’importe qui….
Les illustrations en noir, blanc et rouge sont magnifiques.
Un bonheur à dévorer sans modération. Chacun peut se retrouver dans l’une ou l’autre histoire, mais c’est là tout l’intérêt d’un conte, non ?

 Auteur-illustrateur : Elzbieta – éditeur : Rouergue - nov 2009

  Saltimbanques


Auteure  Marie Desplechin
Illustratrice Emmanuelle Houdart
Editions Thierry Magnier 2011 
Sortis tout droit de l’imaginaire d’Emmanuelle Houdart, onze personnages extraordinaires, aux corps difformes, affublés d’immenses têtes, vêtus de costumes aux motifs et  aux couleurs magnifiques, recouverts de plumes, de poils, de corail ou de végétaux ont été confiés ensuite à l’auteure Marie Desplechin.
Et une histoire est née, des liens inattendus se sont créés, formant une troupe inattendue : une femme à barbe, des sœurs siamoises, un colosse, un homme tronc, une lilliputienne, une diseuse de bonne aventure, une ventriloque, un dresseur de chats, une sirène et un acrobate, portraits étranges et fascinants d’une famille d’artistes.
Un narrateur, tel un Monsieur Loyal,  sert de fil conducteur et nous fait  découvrir d’un récit de vie à l’autre, ce qui unit ces onze personnages.
Ainsi les histoires d’artistes hors normes se croisent et de cette création partagée est né cet  album époustouflant, empreint d’humour tendre et de poésie.
Mais l’aventure ne s’arrête pas là !
En écho à ces personnages tendres et ironiques, le chorégraphe Thierry Thieu Niang a imaginé lui-aussi une création partagée : un conte dansé s’inspirant des personnages  de Saltimbanques, mêlant danseurs amateurs et professionnels de quatre générations confondues et faisant appel à la comédienne Ariane Ascaride, récitante des textes de Marie Desplechin.
 
                               Cette aventure itinérante, coproduite par le théâtre de la Comédie de Valence et par le Conseil Général de Seine Saint Denis, sera présentée le 30 janvier à la salle des fêtes de Largentière et le jeudi 31 janvier à 19h à Saint Jean le Centenier.
(A voir en famille à partir de 7 ans.)



Orphée et la morsure du serpent

Yvan Pommaux auteur
Nicole Pommaux illustratrice
Ecole des loisirs 2009

Autre coup de cœur : l’Orphée d’Yvan Pommaux qui permet une redécouverte d’une des plus belles histoires de la mythologie.
L’auteur établit  un parallèle entre une situation contemporaine et un des mythes fondateurs de notre société. Le lecteur est invité à remonter le cours du temps pour rencontrer le chien Cerbère, gardien des Enfers, Tityos et les vautours acharnés, Sisyphe et son rocher ou les Danaïdes et leurs tonneaux percés.
La première page s’ouvre sur une maison actuelle, théâtre d’une fête où se déroulent les noces d’un jeune couple.
Seul, un jeune homme semble malheureux : il est en effet amoureux de la mariée. Mais, lorsqu’il l’entraine pour lui avouer son amour, la jeune fille, fâchée, s’échappe et est mordue par un serpent.
Une autre jeune fille s’approche alors de lui et le rassure : «  Tu ne t’appelles pas Aristée et la mariée ne s’appelle pas Eurydice »
Et elle lui raconte alors la légende d’Orphée, fils du roi de Thrace et de Callige, qui rendait folles toutes les femmes par la beauté de son chant mais qui n’en aimait qu’une, son épouse Eurydice.
Aussi, le jour où celle-ci, mordue par un serpent, dut partir pour le royaume des Morts, Orphée décida d’aller la chercher. Et l’on connaît la suite…ou bien on se presse de la découvrir !                                                                              
Yvan Pommeaux nous livre là un  bel album au dessin raffiné. La mise en page, le choix des couleurs, le sens du détail, l’illustration pleine de poésie et bien sûr le texte superbe renforcent la beauté du mythe.
                                                                                                                                                                                                    


Les chaussures

Cet  album tout en hauteur, magnifiquement illustré, évoque tout ce que la vie porte de cruautés,  guerres, persécutions, enfermements, exode puis d’espoir, « vu » par une paire de chaussures d’enfants. Il peut être apprécié par des collégiens qui y trouveront matière à éprouver et à comprendre.

« Elles étaient perdues.
Toutes recroquevillées dans la neige
et le froid de l’hiver….

Deux chaussures de petite taille
qui ne voulaient plus avancer. »


Ainsi commence l’histoire  sur une double page où, dans des camaïeux de gris, sont  représentées en plongée les rues d’une ville sur pilotis. La petite fille aux chaussures rouges  semble bien minuscule là où la guerre fait rage!
Les illustrations recouvrent toutes les pages de ce bel album et accompagnent la poésie des textes courts mis en surimpression : tons sombres des premières pages quand la petite fille doit se cacher, puis fuir, tons qui s’éclaircissent quand l’hiver et la neige arrivent ; puis,  place aux tonalités plus chaudes du rouge quand l’espoir revient, avec la fin de la guerre.
Les chaussures rencontrent alors, dans la ville qui renaît, les mains d’un cordonnier :

« Puis elles les ont  caressées tendrement avec leurs doigts
qui s’y connaissent en peau de souliers […]
[…]Alors devant la boutique du vieux cordonnier,
deux petites chaussures se sont mises à danser »

Auteurs : Gigi Bigot, Pépito Matéo - Illustratrice :  Isabelle Chatellard - Editeur : Didier, 2010

Les auteurs de cet album reversent leurs droits à la CIMADE (Comité inter-mouvements auprès des évacués).




Thiên An ou la grande traversée. Du Vietnam à Paris XIIIème
Auteure : Valentine Goby – illustrateur : Ronan Badel
Editeur : Autrement - Collection :Français d'ailleurs - 2009
Cet album fait partie de la collection FRANÇAIS D'AILLEURS aux éditions Autrement, une nouvelle collection de docu-fictions sur l’histoire de l’immigration en France, pour les enfants de 9 à 13 ans, en collaboration avec la Cité nationale de l’histoire de l’immigration. 10 titres ont actuellement vu le jour.

1979, au collège, Thiên An  d’origine vietnamienne a une rédaction à faire sur un sujet qui ne l’inspire pas beaucoup : "Racontez une grande épreuve physique". Il va choisir de raconter son épreuve, quand il a dû fuir le régime communiste pour venir se réfugier en France.
Avec son père, il a fait partie des boat people, ces vietnamiens qui se sont embarqués sur des radeaux de fortune, à la fin des années 1970. Beaucoup sont morts de faim, de déshydratation, ou encore attaqués par des pirates. Arrivés en Malaisie et accueillis dans des camps, ils ont ensuite rejoint la France par avion. Sa mère et ses petits frères sont en route pour entreprendre le même terrible voyage afin de les rejoindre en France…
Le récit mêle la vie quotidienne à Paris et les souvenirs du voyage. C’est Thiën An qui raconte.
 Il écrit sur des feuilles à petits carreaux, avec des croquis, des dessins, des peintures à l’eau ; il met des légendes. C’est présenté comme le journal intime d’un jeune garçon et c’est très émouvant.
A la fin du livre, il y a un dossier bien documenté sur l'immigration vietnamienne en France : histoire, informations culturelles et photos d'époque.

LES ARBRES PLEURENT AUSSI
AUTEUR : IRÈNE COHEN-JANCA - ILLUSTRATEUR : MAURIZIO A.C. QUARELLO
EDITEUR : ROUERGUE - COLLECTION : VARIA – 2009

Le livre a été écrit suite à un article de Laurent Greilsamer,  paru dans le Monde du 9 octobre 2007 intitulé  LES ARBRES PLEURENT AUSSI :

 «[…] Un arbre, cela peut s'admirer, cela peut s'aimer. Un arbre, c'est une source d'énergie, de vie et de beauté. On y pense en apprenant que le marronnier, situé dans la cour de la Maison d'Anne Frank, est en sursis. Cet arbre-là n'est pas tout à fait un arbre comme un autre. C'était bien l'un des rares pans de nature que la jeune adolescente juive, recluse durant deux ans dans un grenier d'Amsterdam pendant la seconde guerre mondiale, pouvait regarder en laissant flotter son imagination. Elle y avait sa place préférée et elle note dans son Journal, à la date du 23 février 1944, alors qu'elle est en compagnie de Peter : « Nous avons regardé tous les deux le bleu magnifique du ciel, le marronnier dénudé aux branches duquel scintillaient de petites gouttes, les mouettes et d'autres oiseaux, qui semblaient d'argent dans le soleil et tout cela nous émouvait et nous saisissait tous deux à tel point que nous ne pouvions plus parler. »
Le 13 mai 1944, elle note encore : « Notre marronnier est totalement en fleur ; de haut en bas, il est bourré de feuilles et beaucoup plus beau que l'an dernier. » Cet arbre, âgé de 150 ans, est aujourd'hui malade au point qu'il est question de l'abattre. Mais peut-on couper l'arbre d'Anne Frank ? N'est-il pas devenu le symbole d'une réclusion et de la liberté ? N'était-il pas un grand frère, un confident, un consolateur ? N'a-t-elle pas écrit : « Aussi longtemps que ceci dure et que je puis en profiter, ces rayons de soleil, ce ciel sans aucun nuage, il m'est impossible d'être triste. »
[…]Mais l'arbre d'Anne Frank a trouvé des défenseurs. Tout sauf la mort ! Un traitement et une structure légère de soutien, disent-ils, pourraient sauver le marronnier. L'Institut Anne-Frank a obtenu un délai, jusqu'au 1er janvier, pour faire une proposition. »

C’est le marronnier qui parle dans l’album ; ses paroles sont pleines d’émotion et elles sont mêlées  aux phrases extraites du journal  d’Anne Franck, tout aussi émouvantes. Actualité de la maladie de l’arbre mise en parallèle avec l’histoire tragique de la jeune juive.
Les illustrations pleines de délicatesse, aux traits fins et fragiles, accentuent la poésie de l’ensemble.
Une réussite que ce beau texte illustré, à recommander aux collégiens ; il pourra compléter la lecture du journal d’Anne Franck.
 Site de La Maison d’Anne Franck :    http://www.annefrank.org/fr/


LE MUR. Mon enfance derrière le rideau de fer
Auteur et illustrateur: Peter Sis - Traductrice : Alice Marchand
Editeur : Grasset Jeunesse 2007

Peter Sis est né en 1949 et a grandi à Prague pendant la guerre froide, en Tchécoslovaquie occupée par les russes. « Je suis né au moment où tout a commencé, du côté rouge – le côté communiste – du rideau de fer. »
Il a su décrire cette période jusqu’à la chute du mur en 1989 avec une inventivité extraordinaire.

 Entre ces deux phrases :« Aussi loin que remontaient ses souvenirs, il avait toujours aimé dessiner –
                                                    Aussi longtemps qu’il aura des souvenirs, il continuera à dessiner »,
il raconte en dessins avec brio toute sa jeunesse en utilisant des moyens très variés :
planches de crayonnés en noir et blanc avec seulement le rouge des drapeaux, des étoiles, des foulards des pionniers au moment du rideau de fer. Le multicolore évoque l’ouest et le rêve d’un monde libre.
Peter Sis diversifie la forme des vignettes, la typographie des textes qui accompagnent les vignettes, la taille des dessins en fonction de ce qu’il veut exprimer.
Il ponctue chacune des trois périodes de son enfance à Prague par une double page faisant ressentir l’ambiance de la période : nuage rouge dans lequel sont représentés Staline, Khrouchtchev, Gagarine, Brejnev…. , page très colorée pour tout ce qui évoquait l’ouest : Les Beatles, voyage, art, poésie … ,page du mur grignoté avec un petit cycliste ailé qui le survole. « PARFOIS , LES REVES SE REALISENT » 
Et, chaque période est ponctuée d’« extraits de mes carnets », entourés de multiples cadres où sont mises des photos, des dessins de l’auteur à l’époque.

C'est un album très riche et émouvant, qui mérite une lecture commentée.
Aucun détail n’est mis au hasard ; chaque double page est à regarder attentivement, explorer, lire, et relire. Tout y est dit et montré sur l’oppression dans le bloc communiste, les rêves, les espoirs d’une génération.

A voir une vidéo réalisée par Peter Sis pour cet album sur : http://www.youtube.com/watch?v=sMqgV5vEglQ


Le messager des étoiles

Auteur : Peter Sis - Editeur : Grasset - 1996

Merveilleux album, tant par le sujet que par la mise en page et les illustrations.
Le sujet : la vie de Galilée ; la chronologie et les repères principaux de son époque nous sont présentés très simplement, en quelques phrases et en de magnifiques illustrations.
La mise en page utilise deux polices de caractères : on peut alors parcourir le livre avec un fil conducteur en bas de page dans une police de caractères classique. Les anecdotes ou les compléments d'information sont en police cursive et seront à lire soit directement sur l'illustration (qui occupe les trois-quarts de la double page) soit dans une marge à gauche de la double page : il faudra alors tourner le livre une ou plusieurs fois sur lui-même pour déchiffrer.
Enfin, chaque illustration, à cheval sur les deux pages est un monde, un univers même ! Le graphisme est délicat, tout en petites touches, dans des tons ocres-beiges-bleus. On dirait des gravures. Des détails surprenants à chaque centimètre carré ! Ces illustrations nous invitent à plonger directement dans le temps, l'univers, les interrogations de Galiléo Galiléi.
Cet album nous pousse aussi à réfléchir sur le courage des découvreurs et des inventeurs qui se sont battus contre l'obscurantisme et l'ignorance, au risque de leur vie : condamné par l'Eglise de Rome, Galilée n'a été réhabilité qu'en 1992 !
Un bon livre pour les jeunes curieux qui vont appréhender leur univers d'un autre œil.

 Là où vont nos pères

Muet sur  plus de 100 pages, cet album nous fait approcher l'itinéraire d'un migrant. Un homme quitte femme et enfants et arrive dans une civilisation qu'il ne connait pas  et ne comprend pas.

C’est aussi  l'histoire de tous les immigrés, tous les réfugiés, tous les exilés, et un hommage à ceux qui ont fait le voyage...
Grâce à la beauté des dessins dans des teintes sépia et l’agencement des vignettes, l’ambiance fait ressentir, presque physiquement, le déracinement et l'incompréhension.
Il peut être apprécié par de jeunes lecteurs et les sensibiliser à ceux  qui sont « d’ailleurs ».

 Shaun TAN est un auteur de bande dessinée et illustrateur australien. Il travaille aussi dans des studios de dessins animés (Toy Story, Les Indestructibles, L'Âge de Glace...).
« Ce livre est en fait basé sur des faits avérés, racontés par plusieurs immigrés. Mon intention était d'essayer de combiner tous ces voyages en une seule histoire universelle, qui pourrait transcender toutes spécificités linguistiques, culturelles, temporelles ou géographiques. Mon intérêt pour ce sujet vient des histoires que mon père me racontait sur son voyage depuis la Malaisie vers l'Australie, puis s'est élargi vers l'immigration de manière plus générale. Je me suis particulièrement intéressé aux histoires d'immigrés voyageant vers New York au début du 20ème siècle, pour fuir la guerre, l'oppression et la pauvreté en Europe. Ce fut  4/5 ans de travail…… » Shaun TAN

Auteur :  Shaun TAN – Editeur : Dargaud – 2007

Au pays de la mémoire blanche
Un album étrange et poétique qui peut plaire aux lycéens, tant il est prenant par les textes et les vignettes magnifiques ! Il y est question d’identité, de liberté, de résistance aussi.
Rousseau, rescapé d’un attentat, se réveille couvert de bandelettes dans une chambre d’hôpital. Côté mémoire, c’est le blanc total. Question identité, il découvre sur ses papiers qu’il fait partie des “chiens”, tandis que les “chats” sont les réprouvés d’un monde violent et policier où les murs poussent le temps d’un songe. Commence alors une longue quête personnelle teintée de fantastique, tandis que les chats luttent pour leur liberté. Grâce à sa “mémoire blanche”, Rousseau va regarder le monde d’un œil neuf et peut-être, pouvoir le changer. (quatrième de couverture)
Stéphane Poulin décrit le processus de création
(sur le site : http://www.ricochet-jeunes.org/livres/livre/44535) :
« Nous sommes souvent confrontés au "temps" lorsqu'il s'agit de réaliser un livre. Cette contrainte est plutôt frustrante parce que je sens souvent que je ne suis pas allé "au bout.[…] Je désirais donc pouvoir réaliser un livre qui ne tiendrait pas compte de ces limites
Carl et moi avons travaillé durant trois ans (à plein temps, en ce qui me concerne) à la réalisation d'une maquette noir et blanc du livre sans contrat (sans argent) et sans éditeur. Nous échangions par courriels les textes et les esquisses. Le livre s'est "arrêté de lui-même" au bout de trois ans.
Nous avions une version complète du livre, très achevée et entièrement réalisée au crayon de plomb que nous avons présentée aux éditions Sarbacane.[…] Ils ont immédiatement accepté notre livre et il a même fallu les convaincre de me laisser du temps pour tout mettre en couleur. Les gens de Sarbacane m'ont versé une avance et m'ont accompagné durant deux ans pour la mise en couleur des planches.

Pour ceux qui s’intéressent à l’aspect technique :
« Les illustrations sont des huiles sur toile. La réalisation d'une seule page demande en moyenne une semaine de travail pour l'esquisse et une autre semaine pour la couleur. La technique employée pour l'huile est sensiblement la même que celle employée au 16e siècle par les peintres flamands et consiste en une succession de fines couches de couleurs appliquées les unes par-dessus les autres afin d'obtenir un fini "velouté" », explique Stéphane Poulin.


Auteur : Carl Norac – Illustrateur : Stéphane Poulin – Editeur : Sarbacane en  coédition avec Amnesty International – 2011

La maison  



1656, 1900, …, 1916, 1918,...1929,...1945,...1967,..., 1999. Cet album nous montre et nous narre l'histoire d'une maison au fil du XX° siècle. Cette maison, datée de 1656 sur le linteau de la porte d'entrée, est située dans un paysage de campagne boisée, des terrasses tout autour. Abandonnée, puis redécouverte en 1900, une famille va s'installer, rénover, cultiver, vivre et faire vivre cette maison au fil des saisons et des années. Le texte écrit en vers, évoque les grandes douleurs du siècle, les petits bonheurs et les labeurs quotidiens ; quatre vers nostalgiques et poétiques introduisent chaque année illustrée.
Les illustrations : comme un plan fixe, de page en page, on voit la maison et les alentours changer. Tout est dans le détail : un champ en friche sur une page est labouré sur la suivante, une terrasse qui s'écroule est relevée plus loin, un auvent est construit, la niche du chien devient poulailler, etc. Cet album offre à voir l'atmosphère du XX° siècle. Il donne aussi l'occasion de revisiter le siècle de manière originale.
Et comme l'a écrit Gaston Bachelard dans La Poétique de l'espace : " Toute grande image simple est révélatrice d'un état d'âme. La maison, plus encore que le paysage, est un état d'âme. "
Cet album est très original, très beau, et devrait plaire à tous les jeunes et moins jeunes à partir de 8 ans.
texte de J.Patrick Lewis,illustré par Roberto Innocenti, éd Gallimard ; 2010

CHEVAL VETU

Mystérieusement, la silhouette d'un cheval apparaît. On découvre petit à petit l'animal: il est étrange, il est fort et beau mais épuisé. Il semble errer, à sa guise, seul sur la plaine, loin des  hommes et des bêtes.
Et c'est la rencontre: « Ils se trouvèrent dans l'immensité ». La vie du cheval-errant vient de basculer car il est attiré par Trois Myrtilles, une femelle mustang du troupeau d'une tribu de comanches.
Les  indiens  sont  inquiets  car  ce  cheval,  grand  et  noir,  donc  laid,  est  caparaçonné  pour  la bataille  et  transporte  des  armes.  Ils  le  nomment  « Cheval  Vêtu ».  Il  est  rejeté  par  Cheval Sacré,  la  monture  préférée  du  chef  et  ce  rejet  va  se  transformer en  haine,  lorsque  le  chef, mesurant le courage du cheval étranger, le choisit pour monture afin d'intimider l'ennemi.   

Cheval Vêtu se plie aux demandes des comanches: aller attaquer les indiens d'une autre tribu, chasser  le  bison.  Puis,  après  avoir  sauvé  Trois  Myrtilles  et  tué  son  rival  qui  l'attaquait 
sauvagement,  Cheval Vêtu décide de s'en aller suivi de Trois Myrtilles pour vivre libre.

 Dans ce bel album au format à l'italienne l'auteur nous plonge dans l'univers des comanches et  évoque  aussi  l'invasion  de  l'Amérique  du  Sud  par  les  espagnols.  L'on  découvre  la  vie  quotidienne et la culture comanches.

La narration  est placée du côté des chevaux qui sont de véritables personnages qui aiment, haïssent et Cheval Vêtu, le héros, a un passé et des souvenirs qu'il évoque.
C'est une histoire d'amour avant d'être une histoire de guerriers.
Les thèmes de l'amour, la différence, la guerre sont évoqués avec délicatesse.
Le texte est cadencé, rythmé.

Le mouvement est présent aussi dans les images (toujours en pleine page ou même, pour l'une  d'entre elles, en double page), surtout dans les scènes de bataille et de chasse.
La nature est là avec le ciel et la terre et les tons utilisés servent à traduire l'atmosphère du  récit. Les ocres  dorés évoquent la  lumière  des grandes plaines, les ocres bruns et les teintes sombres créent une atmosphère plus angoissante.
Il y a beaucoup de force et de poésie dans le texte comme dans les illustrations.
Auteur: Fred Bernard - Illustrateur: François Roca - Éditeur:Albin-Michel jeunesse, 2005

Cubes

C’est un album dont la couverture attire l’œil et le questionnement.
Dès la première double page, le lecteur découvre trois textes différents : un dialogue narratif, les pages d’un journal intime et deux pages d’un roman. Viennent ensuite les illustrations, et les textes de nouveau,  en fragments interrompus, en partie dissimulés.
Petit à petit, le lecteur doit reconstruire l’histoire éclatée, bousculé à travers les images illustrant cubes, cartes et autres jeux d’enfants comme tirés d’une vieille malle au grenier. Surgissent alors, l’Ogre et Alice de Gustave Doré et quelques héros de Walt Disney.
Au fil du journal intime, apparaissent les journées d’un été de retrouvailles dans la maison de famille. Le dialogue narratif est celui deux sœurs qui découvrent la maladie de leur vieille mère dont la mémoire est en morceaux, bousculée chaotique comme les cubes tombés de la boîte. On peut alors mieux saisir l’extrait du roman de Yasushi Inoué « Histoire de ma mère ».
Cet ouvrage est magnifique, il évoque un sujet douloureux d’une manière très sensible et sans pathos et prouve, s’il en était besoin, que la lecture d’un album peut se révéler très complexe.

Béatrice Poncelet est née à Neuchâtel en 1944. Elle étudie les Arts décoratifs en Suisse, travaille dans plusieurs pays européens, retourne dans son pays où elle est professeur de dessin puis s’installe à Paris pour y enseigner le cinéma d’animation.


LA RUE QUI NE SE TRAVERSE PAS

C'est un roman jeunesse très grand format, en hauteur(37,5x19.5).Sur la couverture se dressent des immeubles sombres très hauts; ils se font face et dans le ciel ,grande coulée claire, vole un oiseau. Ils encadrent la rue ,mais cette rue, en bas, on ne la voit pas: le décor et le thème de l'histoire sont presque déjà là.
Dès la première page (double page) nous survolons une ville, aux toits gris et bruns, barrée d'une grande raie noire: la rue(et ce sera sa seule représentation).Il y a des oiseaux et le texte qui présente "elle" et "lui»: ils n'ont pas les mêmes goûts.
Puis , il y a "elle" et "lui" de part et d'autre de cette rue qui les sépare, qui est un "vide", un "gouffre». Et il y a les moineaux joyeux qui eux, traversent la rue. Nous entrons dans les appartements et, entre "elle" et "lui «depuis l'enfance il y a les regards ;puis, au fil des ans et des pages ,ils grandissent et leurs rêves et leur amour aussi.Les moineaux seront leurs messagers. Ils pourront ainsi échanger leurs pensées et leurs désirs.

Le texte, où rêve et réalité se mêlent, est empreint de poésie. Tout est évoqué, suggéré.
Les couleurs des illustrations (des bleus, des bruns, des verts) créent une atmosphère  mystérieuse."Elle" et "lui" sont dévoilés petit à petit: d'abord de dos et simple silhouette, puis de profil et enfin de face et plus les liens se tissent, plus les couleurs  deviennent lumineuses.
Un très beau texte illustré qui pourra séduire les adolescents.
Auteur: Henri Meunier - Illustrateur: Régis Lejonc
Editeur: Editions Notari, collection L'oiseau sur le rhino, section Les hérons, 2011
















Réédité avec cette nouvelle couverture


LE TATOUEUR DU CIEL

Dans un lointain royaume d’Orient, Nabo le jeune fils du sultan Naboka est seul au palais. Son père parti, les caprices de plus en plus insensés du prince tyrannique provoquent la souffrance du peuple et la dévastation du pays. Le retour du sultan, homme épris de justice et d’humanisme, marquera la fin de ce délire d’égoïste et l’enfant devra commencer un long travail afin de reconstruire de tout ce dont il a provoqué la ruine.
Dans un style subtil et poétique, Hubert Ben Kemoun nous offre un conte sur l’ivresse du pouvoir et les aveuglements du désir de toute puissance.
Les illustrations pleine page sont magnifiques, des teintes chaudes mais dans une gamme relativement sombre qui accentue la gravité du récit.
Cet ouvrage classique dans sa forme comme dans son propos permettra cependant une réflexion sur un sujet toujours actuel.
Hubert Ben Kemoun est né en 1958 en Algérie. Il a grandi et vit à Nantes. Il a publié plus d’une centaine de livres de littérature jeunesse mais il écrit également des scénarios pour la télévision, des feuilletons pour Radio France, des pièces de théâtre et des spectacles musicaux. Il a une prédilection pour le roman policier.
David Sala est né en 1973 à Décines. Il est diplômé de l’Ecole d’Art Emile Kohl de Lyon. Il illustre des couvertures de romans et travaille pour l’édition jeunesse. Le tatoueur de ciel, publié en 2003, était son premier travail d’illustration pour la littérature jeunesse.   
Texte: Hubert Ben Kemoun  Illustrations : David Sala    Editions Casterman 2003




LE FOU DES FLEURS

Texte: Yveline Feray   Illustrations : Anne Romby   Editions Picquier Jeunesse 2005

Yvelyne Féray nous ouvre les portes d’un jardin secret de la Chine ancienne. Nous y rencontrons un vieux jardinier si jaloux de ses fleurs qu’il interdit à ses très rares visiteurs de s’approcher trop près pour admirer la splendeur des massifs. Pourtant, les lourdes portes de sa demeure ne résistent pas aux assauts d’un fils de mandarin et de sa bande de malfrats. Désireux de s’offrir ce jardin luxuriant, le vaurien use d’une extraordinaire violence pour assouvir son désir. Heureusement, la Fée des Fleurs veille…
Dans cette adaptation d’un conte chinois, l’auteur allie la délicatesse poétique de la langue à une narration vivante et pleine de rebondissements.
Les illustrations évoquent évidemment les estampes.  Les harmonies de couleurs sont d’une grande richesse, bleus et rouges somptueux, les graphismes très délicats. Ils sont rehaussés, sur certaines planches de collages de pétales de fleurs. Le choix des polices de caractère ajoute à l’élégance de l’ouvrage.
Yvelyne Féray est née en Bretagne. Elle est romancière, historienne et ethnologue. Après des études supérieures, elle devient journaliste puis enseignante au Cambodge. Elle s’installe ensuite au Viet Nam et publiera un roman historique sur la Chine et le Viet Nam du XVème siècle qui est un ouvrage de référence.
Anne Romby est né en Picardie en 1959. Après les Beaux Arts de Reims, elle entre aux Arts Décoratifs de Strasbourg où elle obtient un diplôme de gravure et illustration.




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